Pollution
Humain
Environnement
Economique

L’un des deux surchauffeurs du vapocraqueur n° 1 d’une plate-forme pétrochimique explose vers 15 h. Sur les 8 personnes présentes, 2 sont tuées et 6 sont blessées. Des projections de matériaux réfractaires atteignent des distances de l’ordre de la centaine de mètres à l’intérieur du site.

Le Plan d’Opération Interne est déclenché, l’atelier est évacué et 70 pompiers interviennent. Sur les 6 blessés hospitalisés (dont 2 sous-traitants en intervention), 5 regagnent leur domicile le soir même. Aucun dommage n’est constaté hors du site, hormis le bruit de la déflagration. Les mesures en continu de la qualité de l’air sur la zone sous les vents ne révéleront aucune anomalie. Le ministre de l’industrie et la secrétaire d’État chargée de l’écologie se sont rendus sur place. Aucun produit toxique n’était contenu dans ce surchauffeur de vapeur d’eau (dimensions : 5 m de diamètre et 20 m de hauteur). L’explosion n’a pas été suivie d’incendie.

La ligne de vapocraquage n° 1 avait été arrêtée et mise en sécurité après de fortes pluies dans la nuit du 13 au 14 juillet. Des infiltrations d’eau avaient affecté un local technique perturbant le Système Numérique de Contrôle Commande (SNCC). La procédure de redémarrage de cette ligne est lancée la veille de l’accident dans la matinée. L’un des deux surchauffeurs s’arrête sur température très haute. L’exploitant avait constaté des blocages de la vanne d’équilibrage du débit vapeur en sortie des 2 surchauffeurs vers l’aspiration du compresseur un an auparavant. Cette vanne n’avait pas été révisée durant le dernier arrêt. L’arrêt du surchauffeur entraîne l’arrêt des brûleurs mais pas des pilotes. Les opérateurs isolent par erreur les pilotes. Le surchauffeur A est réarmé vers 15 h en vue d’un réallumage manuel. Les opérateurs ont des difficultés à rallumer les pilotes et décident de rallumer les brûleurs directement, sans balayage vapeur pour éviter l’arrêt du compresseur aval. La vanne d’alimentation en gaz, consignée par sécurité, est ouverte. Un opérateur insère une canne mobile pour allumer les pilotes, guidé par un collègue en hauteur, sur le côté du surchauffeur. Le surchauffeur explose. La quantité de gaz a été évaluée à 10 kg et une surpression interne  de 200 à 300 mbar. Les trappes d’explosion s’ouvrent mais ne sont pas suffisantes pour évacuer la surpression. L’un des opérateurs se retrouve sous la sole frangible (50 t) du surchauffeur qui a été projetée, l’autre décède de l’effet de souffle de l’explosion.

L’explosion résulte de plusieurs causes distinctes dont :

  • la non considération de 5 explosions mineures dans les dernières 36 h avant l’accident à la suite de déclenchement par température haute des surchauffeurs (brûlures et passages à l’infirmerie) ;
  • la barrière technique de sécurité qui interdit l’alimentation des brûleurs en l’absence de flamme sur le pilote n’était pas opérationnelle. Cette barrière est constituée d’un automatisme qui ferme les vannes d’alimentation en gaz si le détecteur de flamme n’a rien détecté 10 s après leur ouverture. A la suite de déclenchements intempestifs peu après son installation, cet automatisme a été désactivé 10 ans auparavant. L’exploitant ayant invoqué un faible nombre d’arrêts / démarrages prévus pour l’unité au cours de son cycle d’exploitation. Il avait préconisé en mesure compensatoire, une surveillance visuelle accrue. Son étude de dangers n’avait pas été mise à jour ;
  • le non respect du mode opératoire redémarrage ;
  • la formation des 2 opérateurs décédés : l’un était en apprentissage, l’autre plus expérimenté, n’était que depuis quelques mois en poste sur cette section. C’était la première fois qu’ils effectuaient cette opération de redémarrage.

Des mesures d’urgence sont imposées à l’exploitant, conditionnant le redémarrage de la ligne vapocraquage : transmission du rapport d’accident, révision de l’étude des dangers relative à cette partie du vapocraqueur, justificatifs du bon état des équipements impactés par un organisme agréé. L’exploitant met en place un automate d’asservissements rendant nécessaires toutes les étapes du démarrage (balayage vapeur, allumage pilote et brûleurs) et un tableau de contrôle permettant de lancer la séquence d’allumage à distance.

7 ans plus tard, l’exploitant est condamné à 200 000 € d’amende, son directeur à 1 an de prison avec sursis et 20 000 € d’amende pour homicide involontaire. Malgré leurs déclarations à l’issue du procès, ils décideront de ne finalement pas faire appel de ce jugement.

Télécharger la fiche détaillée au format .pdf (677 Ko)